François Desriaux, rédacteur en chef de la revue Santé & Travail est membre du jury des Trophées ESSaimer la santé. Il revient sur la démarche QVT de l’Asapn, une association qui suit 2800 adultes environ du département du Nord dans le cadre de la protection judiciaire des majeurs (tutelle, curatelle...).
Fil CIDES : Qu'est ce qui vous a marqué dans la démarche de l'ASAPN ?
Le plus frappant est que l'Asapn cochait toutes les cases avec des notes qui fleuretaient avec le maximum sur l'ensemble des critères que le jury s'est donné pour évaluer les dossiers. Les premières actions remontent à 2014, actées par le conseil d’administration qui s’est donc emparé très tôt des risques psychosociaux (RPS). Et on voit que l’engagement est intégré à la stratégie de l'entreprise, relié intrinsèquement à l'activité.
Autre axe sur lequel je suis vigilant en tant membre du jury : l’expression des salariés. C’est indispensable d’institutionnaliser des temps d’échange, des rencontres pour que s’expriment les difficultés au travail. Et l’analyse des pratiques de l’Asapn montre qu'il n'y a pas de sujets tabous. On parle des risques, de l’organisation du travail, des éventuels manques de moyens qui entraveraient la qualité du travail...
Dernier point, l’évaluation de la démarche. L'absentéisme en baisse, le sentiment de satisfaction qui augmente, ne sont que la partie visible de leur évaluation. Je m’explique. L’évaluation ne sert pas uniquement à dire comment on est beau et bon, elle sert aussi à améliorer le processus. Cela se voit par une démarche d'adaptation permanente au contexte. Mais, dans le cas de l’Asapn, j’ai envie de dire que c'est normal car ça fait partie de la stratégie de l'entreprise, qui est d’améliorer la qualité du travail et en retirer un bénéfice pour le service rendu.
En quoi la démarche de l’Asapn peut-elle être emblématique pour l’ensemble des associations équivalentes, voire de l’action sociale ?
Le dossier nous montre que l’Asapn a travaillé sur ce qu’on appelle la « qualité empêchée ». C'est un problème récurrent dans l’action sociale et médico-sociale qui est au cœur des RPS parce-qu’ on ne vient pas sur ces métiers par hasard, mais avec la volonté d’être au service des autres. Quand les conditions ne permettent pas de faire un travail de qualité à l’hôpital, dans un Ehpad, un service d’aide à domicile ou… la protection judiciaire c’est facteur de décompensation psychique et donc de RPS. En travaillant sur la qualité empêchée, on travaille sur le cœur de la souffrance au travail dans ces secteurs.