Concilier fonction d’aidant.e et emploi : un enjeu crucial pour le futur

29/03/2017
Actualité
Le rôle des aidants a commencé d’être reconnu en France par la création du droit au répit (loi d’adaptation de la société au vieillissement) et tout récemment par l’élargissement des conditions d’accès au congé de soutien familial (loi travail). Si le vieillissement de la population touche l’ensemble de notre « Vieille Europe », le cas français reste l’un des plus favorables pour les aidant.e.s occupant déjà un emploi dans une Union européenne à la traîne.

Le vieillissement de la population est un enjeu européen. Le développement de services à la personne de qualité et accessibles à tous est l’une des réponses. Mais la construction d’un cadre légal européen favorable aux aidants familiaux
est tout aussi cruciale car elle concerne des dizaines de millions de personnes qui ont, aujourd’hui, à faire des choix contraints entre leur vie professionnelle et personnelle.

 

La Charte européenne de l’aidant familial définit l’aidant.e comme étant « la personne non professionnelle qui vient en aide, à titre principal, pour partie ou totalement, à une personne dépendant de son entourage, pour les activités de la vie quotidienne », les aidant.e.s proches assistent un proche dans les soins informels comme les repas, le transport, les tâches quotidiennes, l’hygiène, les tâches administratives, la gestion des rendez-vous et des médicaments…

L’Union européenne à la traîne

Estimés à plus de 8 millions en France, la majorité des aidant-e-s proches travaillent (47%) ou sont retraités (33%). 7 % sont tandis qu’une partie sont au chômage et 13 % inactifs(7%) mais surtout inactifs (13%). À l’échelle européenne, peu de statistiques existent mais il est estimémais on estime que 7% des travailleurs et 11% des travailleuses sont des aidant.e.s, sans que les aidant.e.s au chômage, retraité.e.s ou inactifs ne soient comptabilisé.e.s. Ce sont souvent les conjoint.e.s, les enfants ou les beaux-enfants quand il ne s’agit pas de parents d’un enfant handicapé. Associé aux tâches du « care », c’est-à-dire du soin aux autres, la majorité sont des femmes, elles représentent 57% des aidant.e.s en France et plus de 90% en Allemagne.
Sur un sujet qui touche une part grandissante de la population, l’Union européenne n’a toujours pas élaboré de politique commune et harmonisée entre les États membres. La Commission a tout juste rappelé la nécessité de tenir compte de cet enjeu, notamment dans une communication de 2007 visant à « Promouvoir la solidarité entre génération » en mettant en valeur « les services aux personnes dépendantes dans une société vieillissante » comme l’une des dimensions principales à prendre en considération dans les politiques de soutien à la vie familiale, au même titre que les services d’aides proposés aux parents.

Droits sociaux & revenus

Le principal enjeu reste de favoriser, pour les aidant-e-s n’ayant pas d’activité professionnelle de faire reconnaître leur rôle afin de bénéficier de droits sociaux et d’une rémunération. Malgré un temps d’activité valorisé par exemple en France par la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie jusqu’à 3 000€ par mois pour les aidant-es accompagnants un malade d’Alzheimer, ce travail s’effectue bien souvent gratuitement au nom de l’entraide et la solidarité familiale, sans qu’une rémunération ou des droits sociaux y soient formellement associés. En France, sous certaines conditions, l’aidant.e peut être indemnisé.-e à la condition d’établir un contrat de travail avec un.-e aidé.e bénéficiant de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) destinée aux personnes âgées (8% des bénéficiaires l’ont utilisé en ce sens) ou la prestation de compensation de handicap (PCH) visant à couvrir des frais liés à la perte d’autonomie pour les adultes handicapés.
Dans le même sens, la Belgique propose au niveau national l’allocation pour l’aide aux personnes âgées en parallèle de l’assurance dépendance flamande (20% des bénéficiaires l’ont utilisé en 2006 pour rémunérer un aidant.e) qui se décline dorénavant au niveau wallon et bientôt au niveau bruxellois. De manière plus directe, certaines communes flamandes proposent même une petite compensation financière tandis qu’aucune aide directe n’existe en France.
Misant sur une politique familialiste, l’Allemagne propose, elle, une allocation spécifiquement dirigée vers les aidant.e.s sur l’entièreté de son territoire, sous forme de forfaits de prestations comprenant des formations, conseils, services de répit….

Concilier travail et fonction d’aidant-e

Pour les aidant-.e.-s occupant un emploi, la conciliation des temps d’activité professionnelle avec ceux où ils s’occupent de leur proche doit pouvoir se faire. Face au manque d’informations sur les services disponibles et au coût des maisons de repos, à quel point choisit-on librement de s’occuper de ses proches tout en devant concilier emploi et vie privée ?
Avec plus de la moitié des aidant.e.s cumulant ce rôle et leur vie professionnelle, les entreprises développent de plus en plus des mesures de soutien en ce sens dans leur stratégie RSE. Alors que les politiques de conciliation vie privée/vie professionnelle ne se focalisaient auparavant que sur leurs salarié.e.s parents devant prendre soin de leurs enfants, le fait de devoir s’occuper d’une personne dépendante comme une personne âgée rentre peu à peu dans les mœurs. Trois types de congés spécifiques co-existent en France.
• Le congé de solidarité familiale permet d’assister un malade grave dont le pronostic vital est engagé, ce congé peut aller jusqu’à 3 mois, renouvelable une fois. Le salarié pourra bénéficier de l’allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie d’un montant d’environ 55€ par jour (27€ si le congé est pris sous forme de temps partiel).

• Le congé de proche aidant créé dans le cadre de la loi sur l’adaptation de la société au vieillissement adoptée en décembre 2015, vient élargir le champ d’accès au congé de soutien familial. Il permet d’accompagner des personnes handicapées ou bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) pour une durée de 3 mois renouvelables pour un maximum de 1 an au cours de la carrière.

• Enfin, les parents devant s’occuper d’un enfant gravement malade ou handicapé peuvent utiliser le congé de présence parentale à prendre pour une durée maximum de 310 jours ouvrables sur une période de 3 ans. Le salarié peut bénéficier de l’allocation journalière de présence parentale s’élevant autour de 51€ pour un parent seul et 43€ pour un parent en couple, et ce pour une durée maximum de 22 jours par mois.

Le droit au répit

En décembre 2015, a été adoptée la loi d’adaptation de la société au vieillissement. Si cette loi a élargi l’accès au congé de soutien familial, elle a aussi introduit le droit au répit pour les proches aidant-e-s de personnes bénéficiaires de l’APA (allocation personnalisée d’autonomie). Pouvant occuper une partie considérable du temps libre de l’aidant-e, ce droit permet de se reposer physiquement et moralement afin de mieux assurer sa fonction au quotidien en permettant à la personne aidée d’être accueillie ou hébergée ponctuellement. Une mesure qui permet le repos de l’aidant-e mais aussi la sortie du quotidien pour l’aidé-e.
Ce droit au répit peut être activé quand le plafond de l’APA a été atteint, pouvant alors financer jusqu’à 500€ par an pour l’accueil de jour, l’hébergement temporaire en EHPAD ou en accueil familial de la personne bénéficiaire mais aussi pour des séjours de vacances à deux, aidant-e et aidé-e.

Alors que des mesures de soutien aux aidant-e-s se développent, la montée de mouvements populistes, en France comme dans le reste de l’Europe, soutenant une politique familialiste de retour des femmes au foyer fait craindre que la volonté gouvernementale ne suffise plus pour tenter de trouver des outils permettant de concilier emploi salarié et rôle d’aidant.

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