La montée des chiffres de la crise sanitaire place les associations du sanitaires et médico-sociales, telles que l’Adapéi du Doubs sous pression. L’association qui gère 67 structures et accompagnent 3600 personnes en situation de handicap mental aappris du confinement une forte capacité d’adaptation et de réactivité. Mais les équipes sont fatiguées et craignent d’être, à nouveau, en première ligne en cas de nouvelle vague.
« Nous redoutons fortement les trois semaines qui arrivent. L’accès au dépistage est difficile et le contact tracing externe est compliqué à mettre en œuvre. Alors nous nous organisons en interne », explique Isabelle Maya, chargée de mission en maîtrise des risques à l’Adapei du Doubs. L’association compte 2000 salariés qui accueillent et accompagnent 3600 personnes en situation de handicap, de l’enfant à l’adulte vieillissant, dans 67 établissements. Sont ils prêts à assurer face à cette nouvelle poussée de l’épidémie ? Sur le plan organisationnel, oui. Tout le monde a appris de l’instabilité générale qu’il a fallu gérer au printemps et l’organisation de crise est prête à être redéployée. Mais sur le plan humain, » les gens ont peur de revivre ce qu’ils ont vécu », prévient Isabelle Maya.
Le handicap oublié
Durant le confinement, les équipes ont dû gérer certaines contradictions et questionnements éthiques. Font-elles bien ou non ? Difficile de savoir, dès lors que chaque jour ou presque, des arrêtés et circulaires des tutelles sont venus compliquer et parfois contredire les règles à appliquer. « Au tout début, nous voyions des prestataires qui nettoyaient les machines à café équipés de FFP2, pendant que nos équipes s’occupaient des bénéficiaires sans que le port du masque ne soit autorisé », rappelle la responsable prévention. Elle regrette que le handicap ait été trop souvent oublié dans cette période, derrière les hôpitaux et les Ehpad : « certains de nos établissements dépendent de l’Agence régionale de santé, quand d’autres dépendent des départements », illustre-t-elle.
Des salariés ont été touchés par le virus et certains mêmes hospitalisés et, heureusement aucun décès ne sera à déplorer. Mais quatre résidents des établissements, fragiles en raison de facteurs de comorbidité, ont succombé durant les premiers mois de l’épidémie. » Nos bénéficiaires ont souvent grandi ensemble et les familles se connaissent. Un décès est toujours très émouvant. Mais là, nous avons du faire des enterrements à dix personnes, gérer des périodes de deuil sans accompagnement des proches », regrette Isabelle Maya.
Centraliser pour décharger les directeurs
Pour faire face, « nous nous sommes organisés en cellule de crise qui traitait les changements quotidiens de la réglementation et délivrait un message clair aux établissements. Il fallait leur permettre de se concentrer sur l’opérationnel, c’est-à-dire les bénéficiaires », explique Emmanuelle Coudray, directrice des ressources humaines de l’Adapéi du Doubs. C’est pour la même raison que la gestion des équipements a été centralisée et tout particulièrement les équipements de protection individuels, ce qui a permis d’équiper toutes les équipes avant la fin du mois de mars.
A la recherche du répit
Le climat anxiogène a nécessité une forte présence de la direction auprès des équipes : « c’était important que l’équipe de direction soit sur le terrain « , résume Isabelle Maya. Et après le confinement, il a encore fallu s’adapter. La période estivale est un moment où des voyages s’organisent en collaboration avec des prestataires. Cette fois-ci, il a fallu imaginer d’autres loisirs et activité à proximité, voire sur place. Et ce sont à nouveau les équipes qui ont du assumer.
Quant aux familles dont les enfants sont habituellement pris en charge en établissement de jour, elles ont eu à s’en occuper durant des semaines, même si elles bénéficiaient d’un accompagnement à distance et de visites régulières. C’est pourquoi les établissements ont prolongé leur activité durant l’été, pour assurer un répit aux proches.
Mutualisation RH volontaire
Heureusement, « une centaine de salariés volontaires, sans activité parce que leur foyer ou leur établissement avait été fermé, sont venu renforcer les établissements qui continuaient leur activité, dans des conditions de charge accrue par les protocoles sanitaires », explique Emmanuelle Coudray. « La solidarité a joué à plein, mais la fatigue et le stress cumulés, pourraient générer un état d’épuisement psychologique. Il faut rester vigilent pour repérer ces situations », estime la DRH.
Comme depuis le début, l’Adapei s’efforce d’anticiper pour que les protocoles de travail soient le plus stable possible sur la durée. Le cercle collectif se restreint pour éviter l’isolement total en cas de découverte d’un cas. « Nous espérons surtout qu’on oubliera moins les équipes qui accompagnent les personnes en situation de handicap mental. C’est important de rappeler combien tous les professionnels se sont engagés, mais aussi les familles qui se sont adaptées aux différentes consignes. Et je n’oublie pas tous les partenaires qui nous ont aidé », ponctue Isabelle Maya.