De quel bois sera fait la branche autonomie

12/10/2020
Actualité

Le rapport de préfiguration de la branche autonomie remis au gouvernement mi-septembre pose le principe d’un périmètre élargi au grand-âge et au handicap. Sources de financement, gouvernance nationale et territoriale… Laurent Vachey, l’auteur du rapport, pose toutes les solutions sur la table. Mais les professionnels s’inquiètent surtout du énième report de la loi Grand-âge sensée améliorer, notamment, l’attractivité des métiers du domicile.

« L’heure est désormais aux preuves ! ». Lors de l’assemblée générale de l’UNA dont elle vient de prendre la présidence, Marie-Reine Tillion, a exprimé l’impatience du secteur médico-social et tout particulièrement de l’aide à domicile devant Brigitte Bourguignon ministre déléguée à l’Autonomie.

Car pour l’heure, le projet de loi grand-âge autonomie reste bloqué dans les limbes. Annoncé par Emmanuel Macron en 2018, il est repoussé en 2019, puis en 2020. Une demi-douzaine de rapports dont le Rapport Libault qui fixe les enjeux de financement, le Rapport El Khomri sur la nécessaire revalorisation des métiers du domicile sont rendus suite à de larges concertations. Mieux, le cinquième risque de la sécurité sociale, la branche autonomie, est créé par la loi du 7 août 2020. Dernier rapport en date, celui de Laurent Vachey, pose les termes de préfiguration de cette cinquième branche.

Un Laroque de l’autonomie

Mais toujours pas de projet de loi autonomie. « Nous sommes au début d’une phase opérationnelle », veut rassurer Brigitte Bourguignon. La ministre fait référence à la convocation prochaine d’un « Laroque de l’autonomie », une nouvelle consultation de la parties-prenantes destinée à construire le projet de loi. La loi n’arrivera qu’en 2021, voire, au second semestre. En attendant le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2021, établira ce qu’il en est du périmètre et des premières modalités de financement.

Dépendance et handicap

Sous ces angles le rapport Vachey a été bien reçu par la plupart des professionnels et un certain nombre de préconisations devraient se retrouver dans le PLFSS. Ainsi, le périmètre de la cinquième branche intègrera les prestations dépendances, mais aussi les prestations handicap telles que l’Allocation adulte handicapé (AAH). Un doute persiste toutefois sur la Prestation de compensation du handicap (PCH). Marie-Anne Montchamp, présidente de la Caisse nationale de solidarité et l’autonomie (CNSA) qui sera chargée de la gestion de la branche estime dans une interview à Viva : « qu’il faut donner à la CNSA la capacité de piloter le périmètre de l’autonomie sous tous ses aspects : le soin, le matériel, le logement, l’accompagnement en prévention de la relégation. C’est un tel pilotage national qui doit permettre d’articuler les divers financements et de contractualiser avec les départements pour des réponses territoriales. »

Œuvre de simplification

Caroline Janvier, députée du Loiret et rapporteure du PLFSS sur le chapitre médico-social précise : « cette 5e branche doit conduire à une œuvre de simplification. » Le regroupement des prestations handicap et dépendance y participe s’il « réduit le nombre d’interlocuteurs, car plus il y en a, moins on est accompagné correctement ». La député cite cite aussi « les unité de soin longue durée et les Ehpad » dans le périmètre à établir.

Gouvernance, quid des départements ?

La CNSA sera le pilote national du nouveau navire de la sécurité sociale. Son principal atout est la présence de toutes les parties-prenantes dans ses instances. Mais Laurent Vachey alerte sur la symétrie nécessaire qu’il faudra assurer avec les quatre autres branches qui, elles, « ont une gouvernance paritaire. »

L’un des nœuds de cette réforme est dans la déclinaison territoriale de cette gouvernance orchestrée par la CNSA. Cette déclinaison conditionnera les relations aux usagers, mais aussi la relation aux intervenants du secteur sanitaire et médico-social. Il va falloir trouver la bonne formule pour intégrer en un dispositif unifié ce qui existait sur le champ du handicap avec les Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), les Agences régionales de santé (ARS) et les Conseil départementaux.

En ce qui concerne la dépendance, c’est le rétablissement de l’équité territoriale qui guide les réflexions : sortir du système de double tarification ou de la variabilité, entre départements, du taux de prise en charge au domicile d’un département à l’autre. La CNSA serait garante de la bonne coordination entre les ARS et les Conseil départementaux. Le modèle posé dans le rapport est celui d’une Maison départementale de l’autonomie (MDA) qui assurerait l’allocation des fonds, l’évaluation des besoins des personnes, la décision d’attribution des prestations et enfin l’accompagnement des parcours.

Comment financer dès demain ?

Le financement de la branche est un sujet à double détente. Au premier plan il va falloir boucler un financement suffisant pour installer cette cinquième branche dès 2021, tout en répondant à la doctrine gouvernementale du zéro impôt nouveau. Objectif, trouver un milliard d’euros en 2021, puis 3 à 5 milliards à partir de 2024.

Le rapport Vachey propose sans trancher une série de préconisations dont des transferts de financement (ex. : mobiliser en partie des versements prévus du Fonds de réserve des retraites pour financer l’aide à la rénovation des Ehpad), la réduction des plafonds de quelques avantages fiscaux (ex. : comment passer de 12000 euros à 6000 euros le plafond du crédit d’impôt pour de l’aide à domicile) ou encore des mesures d’économie (ex. : 400 millions d’euros sur l’AAH d’ici 2024).

Mais pour financer la montée en charge de la 5e branche corrélée au vieillissement de la population (+ 100 000 personnes dépendantes d’ici cinq ans) il faudra mettre en face d’une dépense pérenne, une recette pérenne. De nouveaux prélèvements obligatoires sont envisagés, tels que la création d’une seconde journée de solidarité (en 2020, la journée de solidarité généré 2,132 milliards d’euros), ou l’alignement du taux de CSG des retraités sur celui des actifs.
Pour rappel, le rapport Libault évalue à 6,2 milliards d’euros le coût pour les dépenses publiques d’ici 2024 et 9,2 milliards en 2030.

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