La prévention gonfle ses muscles

19/09/2018
Actualité
« Big bang », « révolution » de la santé au travail, le Rapport Lecocq a suscité des mots forts parmi les commentateurs et les partenaires sociaux viennent d’acter l’augmentation du financement de la prévention via la branche AT-MP de l’assurance maladie.

Tout arrive en même temps, pour la prévention santé au travail. D’un côté, le rapport Lecocq-Dupuis-Forest, attendu depuis le printemps a été remis au Premier ministre fin août. De l’autre, les partenaires sociaux sont parvenus le 5 septembre à un accord (qui aurait du être trouvé dès la fin 2017) dans leur négociation de la convention d’objectifs et de gestion (COG) 2018-2022 de la branche Accident du travail Maladie professionnelle (AT-MP). Cette négociation devait notamment fixer l’utilisation de l’excédent de la branche AT MP (env. 800 millions d’euros). L’ accord prévoit, notamment, d’augmenter le financement de la prévention dans les entreprises de 50 à 85 millions d’euros dès 2018 et à 100 millions à l’horizon 2020 L’année 2018 étant largement entamée, il est possible que les fonds non consommés cette année soient affectés au budget 2019. Cette augmentation va dans le sens du rapport Lecocq qui souhaite passer de la prévention contrainte à une  « prévention effective », notamment en soutenant financièrement la formation des managers.

Guichet unique

Le rapport en lui-même est qualifié, tantôt de big bang, tantôt de révolution   de la santé au travail. Pourquoi ? Parce qu’il remet totaleent à plat l’architecture des acteurs en les réunissant au plan national et régional et qu’ il regroupe aussi l’ensemble des financements dans un unique fonds de prévention (Lire Ce qu’il faut retenir du rapport Lecocq-Dupuis-Forest). Autre proposition significative : séparer le contrôle des entreprises, de l’activité de conseil. Ce changement atteindrait principalement les Caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat), qui assument dans les régions ces deux missions, le conseil représentant 80 % de l’activité.

Une révolution de vitrine ?

Pour Tony Fraquelli, conseiller confédéral Travail et santé à la CGT, ce serait une erreur : « le contrôle des Carsat est justement l’occasion de proposer une mission de conseil en prévention aux entreprises qui ne répondent pas aux exigences ». Mais pour le représentant de la CGT, cette mesure illustre l’esprit du rapport : « la création d’un guichet unique peut être un progrès. Mais ce n’est qu’une vitrine. Il s’agit de faire passer le patronat du statut de coupable à celui de victime des contraintes qu’on lui impose », regrette-t-il. Pour Henri Forest, ancien secrétaire confédéral de la CFDT et co-rapporteur, « il s’agit de clarifier le panorama des acteurs car ce que nous disent les usagers (employeurs, salariés) c’est qu’ils ne connaissent qu’une partie des services de prévention ».

L’enjeu de la proximité

L’animation territoriale des acteurs, tant les Aract que les Carsat et les services de santé au travail (SST), par un opérateur unique devrait servir une plus grande simplicité d’accès aux services. Et Henri Forest précise : « le maillage territorial des SST est maintenu. Ce qui monte au niveau régional, c’est le pilotage et la gouvernance ». Mais là encore, pour Tony Fraquelli, le risque « est de construire, loin du terrain local, une bureaucratie syndical au niveau régional ». Cette préoccupation de cultiver la proximité avec le terrain sera l’un des véritable enjeux de la réforme qui doit découler de ce rapport, via un projet de loi prévu en 2019. Car si la lisibilité de l’écosystème par les usagers est importante, elle ne sert à rien sans un service accessible.

Une loi en 2019

Comme toute refonte d’un système, cette réorganisation de l’écosystème de la santé au travail ne se fera pas sans heurts, ni frottements. Les syndicats d’employeurs, les organisations de salariés, mais aussi l’administration devront trouver un terrain d’entente. Quant au gouvernement, c’est à lui de donner le tempo. Un projet de loi doit être proposé courant 2019 sans que l’on sache jusqu’où la mission Lecocq inspirera les ministres de tutelle (Travail et Santé), notamment pour rénover le cadre d’action. « En tant que rapporteurs, nous avons proposé une rénovation profonde du cadre de la santé au travail. Cette rénovation ne peut se vendre à la découpe. Soit on achète tout, soit rien. »

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