« Les CAE sont une réponse à la problématique de la multi activité »

25/10/2016
Actualité
Myriam Faivre est directrice de CLARA, coopérative d’activité et d’emploi spécialisée sur les professions culturelles. Après dix ans de développement, CLARA est récompensée du Prix de la performance économique¹ remis à l’occasion du lancement du Mois de l’ESS 2016.

Quelle est la particularité de la coopérative d’activité et d’emploi CLARA ?

Sa particularité est d’accompagner les professionnels du secteur culturel. CLARA leur permet d’entreprendre alors même que artiste et entrepreneur, cela ne va pas toujours de soi. tous les entrepreneurs de CLARA ont l’ambition de valoriser leurs compétences et leurs métiers, vivre de leur talent et pouvoir collaborer avec d’autres.

Le secteur culturel est l’un de rares qui a généré des CAE spécialisées, la plupart étant généralistes… pourquoi ?

Que ce soit pour la création d’Artenréel en 2005 ou de CLARA en 2006, l’initiative est venue de professionnels du secteur culturel qui se demandaient comment pérenniser des carrières d’artistes sur le long terme. Aujourd’hui, les artistes se rendent bien compte qu’il est de plus en plus difficile de mener une carrière sur la seule activité de création qui est souvent ponctuelle et cyclique. Or ils ont d’autres moyens d’expression de leurs talents. On voit des musiciens devenir réalisateurs ou producteurs, comme des techniciens devenir formateurs ou profs pour transmettre leur savoir. Au sein de CLARA, nous avons contribué à la compréhension et à la validation d’un modèle économique où un professionnel de la culture peut, sous forme entrepreneuriale, vivre de sa multi activité.

Autrement dit, CLARA et les CAE consoeurs sont une réponse à la multi activité dont on nous dit que c’est une tendance lourde pour de nombreux secteurs d’activités…

L’apparition récente des slasheurs, confirme absolument que nous sommes une réponse à un besoin qui monte. D’autant qu’il répond à tout une série de questions que se posent ces slasheurs sur leur bien-être au travail, sur l’organisation d’un travail non subordonnée, sur les modes de décision de gestion de l’entreprise.

Après dix années d’existence, vous recevez le Prix ESS de la Performance économique. Quels sont les éléments de performance économique que vous pouvez revendiquez ?

Tout d’abord, la création d’emplois pour les entrepreneurs. C’est le choix de chaque sociétaire et de chaque entrepreneur salarié de rentrer dans la coopérative et d’y rester. Depuis dix ans, il y a toujours plus de personnes qui nous rejoignent. Nous sommes actuellement 144 entrepreneurs salariés dont 21 sociétaires. Et certains des 144 ont généré d’autres emplois. La CAE a employé en 2015 pour le compte des entrepreneurs salariés concernés, 10 stagiaires dont cinq rémunérés, 66 cachets d’artistes versés et huit CDD.

Un autre élément de performance est que les entrepreneurs salariés partagent une contribution coopérative (10 % prélevé sur le chiffre d’affaires de chacun) qui nous permet d’offrir des services centraux mutualisés mais aussi des services d’accompagnement de personnes qui sont en démarrage d’activité.

Quel est le salaire médian généré par les 144 entrepreneurs salariés ?

C’est très difficile à dire car le critère de l’ancienneté est important sur ce plan. Notre objectif est de salarier ceux qui arrivent dans la coopérative à temps plein et au Smic dans un délai de six à huit mois. Comme c’est un CDI, cela leur permet de poser une vision de long terme. Les premiers commencent donc au Smic et ensuite ils augmentent leur taux horaire en même temps qu’ils développent leur activité.

Quelle est la part des fonds publics dans les ressources de CLARA ?

Sur 1,8 millions d’euros de produit, 13 % proviennent de fonds publics européens (FSE) et collectivités locales afin de soutenir la mission d’appui de l’équipe de la CAE. Et CLARA est l’une des CAE les mieux soutenue, notamment parce que la phase d’accompagnement est longue.

Les détracteurs des CAE estiment qu’elles consommeraient trop de fonds publics. Quel est votre point de vue ?

Quand l’auto-entrepreneuriat a été créé, l’Etat a mobilisé des moyens financiers afin de le valoriser. Les CAE, elles, ont grandi durant vingt ans avant que la loi ESS ne reconnaisse notre cadre juridique. Nous n’avons pas pour autant bénéficié d’aucun fonds publics afin de valoriser notre modèle.

Deuxième point. Nous accompagnons un certain nombre de personnes qui testent leur activité et donc ne génèrent aucun chiffre d’affaires. Par conséquent, ils ne participent à la contribution coopérative… mais en bénéficient. Cela fait des années que, avec le réseau Coopérer pour entreprendre, nous demandons à l’Etat de contribuer au financement de cette mission d’intérêt général mais c’est compliqué. Donc, pour répondre à votre question, ceux qui nous critiquent sont issus d’une économie classique qui a des aides mais ne le dit mais continue de montrer du doigt l’ESS en général et les CAE en particulier qui sont elles transparentes sur ce point. A nous de définir clairement les critères de notre performance économique, cela contribuera certainement à mettre en avant les incohérences des autres secteurs et des autres modèles. Depuis 25 ans qu’existe notre modèle, nous avons été des pionniers de l’entrepreneuriat collaboratif et d’une économie collaborative qui ne parle pas assez des CAE.

1. La mutuelle Chorum est un partenaire historique du Mois de l’ESS. A ce titre Chorum a remis le 25 octobre le Prix ESS Performance économique à Myriam Faivre, directrice de CLARA.

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