Nicolas Schmit : « Faire de l’économie sociale un vrai projet européen »

12/03/2019
Actualité
Ancien ministre du Travail et de l’ESS du Luxembourg, Nicolas Schmit est le candidat de son pays à la présidence de la Commission. Il sera présent le 14 mars à Strasbourg, au Colloque de l’Uniopss  « Les associations de solidarité font l’Europe sociale »

Quel regard portez-vous sur l’ESS française ?

L’ESS en France a une longue histoire de développement. En cela elle constitue une vraie force et la Loi Hamon, qui lui a donné un cadre, lui a permis de se développer encore d’avantage. Nous nous sommes inspirés, d’ailleurs de cette loi au Luxembourg.

Elle est aussi devenue une force d’innovation sociale avec de nombreuses initiatives. J’étais très intéressé par l’expérience des Territoires zéro chômeur que j’ai reprise au Luxembourg. C’est cette nouvelle vague d’entreprises sociales qui suit un véritable projet de transformation sociale. Quand on voit que certaines régions sont un peu délaissées,  l’Économie sociale  est un acteur important au niveau local et régional.

Et je vois aussi qu’il y a ne vrai attention à l’égard de l’ESS de la part des pouvoirs publics. C’est important pour l’Europe.

Vous évoquez le cadre donné par la Loi Hamon. Avez-vous l’espoir d’une meilleure structuration et reconnaissance de l’ESS au niveau européen ?

C’est tout le sens de l’effort que nous avons déployé depuis quelques années avec un certain nombre de pays et que l’on retrouve dans la Déclaration de Luxembourg. Et avant nous, la commission précédente, avec Michel Barnier, avait lancé une initiatives sur l’économie sociale à l’échelle européenne. Mais l’ESS n’est toujours pas reconnue comme un véritable acteur économique et social. Il faut continuer à encourager le groupe de contact au parlement européen qui regroupe des députés de tous horizons politiques et sont très engagés sur la promotion de l’économie sociale. Le Comité économique et social européen a, aussi, beaucoup travaillé et fait des propositions qui mériteraient d’avantage de considération.

Quelles propositions ?

Une proposition a été adoptée lors de l’adoption du fameux plan sur les investissements stratégiques sans avoir été vraiment utilisée : le Parlement européen a obtenu  l’inscription de l’ESS comme un possible bénéficiaire de fonds. Et pourtant, la Banque européenne d’investissement, elle, a l’ESS dans son radar.

Un des problèmes est qu’il n’y a pas de Commissaire responsable de l’économie sociale qu’on retrouve dispersée entre le Marché intérieur, chez la commissaire des affaires sociales, etc. Il faudrait mieux organiser la coordination pour faire de l’économie sociale un vrai projet européen. D’autant que le projet européen, lui-même, doit aussi transformer son modèle. Les problématiques sont connues : inégalités, précarité, sous-développement régional sur le plan social et, à côté, nous avons la dimension écologique avec le réchauffement climatique, une réorientation du modèle économique dans un sens plus durable.

L’économie sociale pourrait jouer un rôle de pionnier entraînant même l’économie dite « normale » vers ces thèmes de durabilité et d’innovations sociale.

Les acteurs associatifs militent pour une Europe plus solidaire. Faire de l’économie sociale un projet européen pourrait y contribuer, alors que la force des lobbies use la confiance des citoyens dans l’Europe ?

Je suis le défenseur d’une Europe sociale. La montée des populismes a pour cause, entre autre, cette perception que l’Europe n’attache pas suffisamment d’importance à l’Europe sociale. Il y a eu des avancées, mais elles ne suffisent pas. Suis-je optimiste ? Pas forcément, quand je lis la récente tribune de la nouvelle dirigeante du parti conservateur allemand où elle exclut l’Europe social. C’est signe qu’il y a un combat à mener. Les alternatives aux politiques européennes actuelles existent, et elles sont sociales, solidaires, écologiques. L’ESS peut jouer un rôle véritablement moteur.

Est-ce que le lobby de l’ESS est à la hauteur de ses ambitions ?

Je l’ai vu se renforcer. Mais il est clair que sans les acteurs de l’Economie sociale on ne peut pas avancer. Ils doivent donc se faire entendre…

Serez-vous le candidat luxembourgeois pour présider la future commission ?

Je suis candidat aux élections européennes et il est vrai que j’ai été désigné par le nouveau gouvernement luxembourgeois et par mon parti comme candidat à la commission européenne. Je souhaite ferai entendre cette voix pour l’Europe sociale et pour une Europe qui prenne pleinement la mesure de l’ES dans ce contexte.

Vous êtes candidat aux élections européennes et vous êtes le candidat du Luxembourg pour remplacer Jean-Claude Junker à la tête de la Commission. En France Michel Barnier est un postulant sérieux qui a travaillé à la promotion de l’entrepreneuriat social. L’ESS a une chance d’avoir une oreille plus attentive qu’auparavant à la tête de la commission européenne ?

Je  ne peux anticiper sur le choix du prochain président ou des candidats des autres pays. Mais c’est dans l’intérêt de l’Europe, que le prochain président ait la fibre sociale. Il faut préparer une transition juste et l’ESS doit y avoir sa place.

Lire notre article : Nouveau tour d’Europe en solidaire…

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