Pascal et Natacha : quand l’épicerie solidaire hacke la grande distrib’

27/03/2020
Actualité
#Derrièrelesmasques 04 : au  cœur de la Sarthe, la Maison des projets, un centre social, a renversé le fonctionnement de son épicerie solidaire afin de maintenir son service aux familles précaires. La boutique est devenue un drive pour s’adapter aux contraintes du confinement et maintenir un minimum de lien social.

Face à la crise sanitaire, le Fil CIDES change son format et alimentera régulièrement une chronique qui raconte le quotidien des salariés, bénévoles de l’ESS qui agissent pour la santé, la solidarité, l’accompagnement des plus vulnérables et le lien social. Une chronique de l’ESS en action, pendant, comme avant la crise.

C’était il y a deux semaines à peine. L’Épicerie solidaire de la Maison des projets, à Ballon-Saint-Mars dans la Sarthe, ouvrait encore ses les portes trois jours par semaine. Ses clients ? Des personnes en grande précarité  qui bénéficient d’un tarif social pour se fournir en alimentation (frais, viande, épicerie) et produits d’hygiène à tout petit prix. Entre 10 et 30 % de la valeur marchande du produit. Dans une épicerie solidaire chacun de choisir les produits qu’il souhaite, mais l’accès est limité à trois ou six mois, en fonction de la situation sociale. On fréquente l’épicerie solidaire parce que les minimas sociaux ne suffisent pas ou parce que, travailleur pauvre, la panne de sa voiture est la tuile qui peut faire plonger le budget domestique dans le rouge marron, à moins d’avoir un coup de main temporaire… sur son budget alimentation.

Quand l’annonce du confinement intervient, c’est le branle-bas de combat. Pascal Masson, qui supervise l’activité de l’épicerie, sait qu’ils ne pourront pas maintenir le fonctionnement habituel. La boutique est trop exigüe, l’accueil du public nécessiterait une désinfection régulière difficile à gérer et un certain nombre de bénéficiaires seront dans l’incapacité de se déplacer jusqu’à Ballon Saint-Mars. Ils viennent de toute la Communauté de commune Maine Cœur de Sarthe qui s’étale sur une vingtaine de kilomètres de rayons au nord du Mans.

Hacker la grande distribution

Le Centre social, lui, doit mettre en veille l’accueil physique des familles et fermer le centre de loisirs. Résultat, la majeure partie des salariés se retrouve en télétravail ou en sous activité. L’idée germe alors de hacker ce que fait la grande distribution. Pascal y a travaillé 17 ans…

L’épicerie solidaire se transforme en quelques jours en drive ! Cinq salariés du centre social, en télétravail, se chargent d’appeler la soixantaine de familles bénéficiaires le mardi, après la livraison des denrées par la Banque alimentaire complétées par des dons de producteurs locaux et d’une moyenne surface voisine. «  On leur donne la liste des produits disponibles et ils nous passent leur commande, explique Natacha Bardet qui s’est improvisée télé-opératrice en plus de diriger le centre de loisirs, actuellement fermé. « C’est aussi l’occasion de prendre des nouvelles, demander comment ça se passe avec les enfants, est-ce que le suivi de l’école se passe bien avec les ados. J’appelle les mêmes familles chaque semaine pour bien faire le lien… »

Livraison sans café

Parce que d’habitude passer à l’épicerie solidaire, c’est beaucoup plus que simplement remplir un chariot. On y boit un café, on peut se faire coiffer. Il y a même une socio-esthéticienne ! Un lieu où l’on cause quoi… Le maintien du lien en cette période de confinement était la priorité pour les équipes de la Maison des projets, malgré les contraintes de distanciation sociale… « On discute moins que d’habitude, puisqu’on a organisé un planning de distribution des commandes par quart d’heure et sur le pas de porte de l’épicerie. Mais comme nous disent certains, ça fait tellement de bien de croiser un visage connu ! » raconte Pascal. Et le téléphone sert de fil rouge… « Nous avons un premier fichier avec les 60 familles bénéficiaires, mais nous en avons un deuxième que nous appelons deux à trois fois par semaine car ce sont les familles les plus fragiles selon nous », explique Natacha.

Rendez-vous après le confinement !

Ce jeudi matin, Pascal est aidé de Kevin, du service jeunesse, pour préparer les colis. Natacha coche les bons de commande. Pascal ira livrer une demie douzaine de personnes à domicile, pendant que les autres viendront récupérer leur colis à heure fixe.

L’équipe de la Maison des projets est prête à tenir ainsi toute la période de confinement. « Maintenir ce lien et ramener le sourire aux gens, ce n’est que du bonheur », salue Natacha, avant de repartir chez elle et se replonger dans ses dossiers pour préparer les séjours d’été… avec une bonne dose d’optimisme.

Un autre rendez-vous est déjà prévue, mais la date à définir… Dès la fin du confinement, la Maison des projets organisera un grand pique-nique derrière le centre. « Nous avons la chance d’avoir une vue magnifique sur la vallée de la Sarthe », sourit Isabelle Livache, la directrice. Et ce ne sera pas que pour les familles de l’épicerie. « Tout le monde sera invité ! »

 


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