PLF 2019 : aménagements à la marge en attendant le Pacte ?

07/11/2018
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Le débat parlementaire permet d’améliorer ou corriger quelques éléments du projet de loi de finance initial. Mais les enjeux semblent déjà ailleurs, avec le pacte de croissance et une proposition de loi pour la vie associative.

L’examen du projet de loi de finance 2019 en première lecture est en cours à l’heure où nous publions cet article, mais plusieurs amendements concernant l’ESS ont déjà été votés. Le premier d’entre eux, porté par Sarah El Hairy, députée de Loire-Atlantique, est venu corriger ce que certains appelleront une bourde, d’autre un péché par ignorance de la part de Bercy. Le projet de loi de finance prévoyait en effet de réduire la déductibilité du résultat mis en réserve impartageables par les Société coopératives d’intérêt collectif (Scic) aux seuls montants qui dépassent les taux légaux. Or la plupart des Scic place la totalité de leur résultat en réserve. L’amendement de Sarah El Hairy permettra de maintenir la déductibilité sur l’ensemble des sommes mises en réserve. Cet épisode législatif, somme toute limité en termes d’impact, reflète toutefois la difficulté pour les acteurs de l’ESS de faire reconnaître leur spécificité à tous les étages de l’exécutif. L’exposé des motifs de l’amendement explique : « Il est probable que l’administration n’ait pas voulu mettre à mal la dynamique de développement des Scic, mais a dû estimer que ce dispositif était sous utilisé, concernant plus de 800 sociétés pour un coût fiscal d’environ 1,6 M d’€. Cependant, cette « sous » utilisation n’est pas liée à une inutilité mais à la relative jeunesse du statut, créé en 2001 (…) avec une forte croissance surtout depuis 2012 ».

Le DLA gagne 2 millions d’euros et les perd en séance

Le débat en commission des affaires économiques avait permis à Yves Blein, député du Rhône et rapporteur de la Mission ESS, de faire adopter un amendement prévoyant de établir les crédits de financement du Dispositif local d’accompagnement (DLA) de 8,4 à 10,4 millions d’euros, soit leur niveau de 2017. Une baisse net dont s’est ému le Mouvement associatif dans un communiqué. Mais en séance, François de Rugy, le ministre de la Transition écologique et solidaire n’a pas soutenu l’amendement qui a été retiré. Lot de consolation pour le député du Rhône, les députés ont adopté une modification de la présentation des crédits à l’ESS dans le budget de l’Etat : intégré au programme « Expertise, information géographique et météorologie » depuis 2018, les crédits de l’ESS disposent de leur propre ligne intitulé « Économie sociale et solidaire ». Une clarification toute symbolique.

D’autre part, Sarah El Hairy, encore elle, a obtenu d’étendre l’exonération des droits de mutation sur les legs et donations faites aux fondations et associations reconnues d’utilités publiques. Jusqu’à maintenant, seuls les fonds de dotation bénéficiaient de cet avantage. Fondations et association s’interdisaient alors souvent d’accepter dons et legs en raison du coût fiscale et administratif que cela représentait. Réaliste, la député de Loire-Atlantique reconnait que « si la mesure va dans le bon sens, nous restons à la marge » au regard de l’impact de la disparition de la défiscalisation des dons et investissements dans les entreprises solidaires lors de la réforme de l’impôt sur la fortune en 2017. Les dons « ISF » auraient baissé de moitié en 2018 par rapport à l’année dernière. La députée réclame d’ailleurs au gouvernement « une évaluation de la suppression de l’ISF PME et don pour l’ESS ».

Le Pacte de croissance : jauge des ambitions gouvernementales

A part ça… peu de modification du PLF. Et à interroger les parlementaires, il semble bien que les enjeux soient ailleurs. Sarah El Hairy estime que « l’ESS n’est pas prise en compte dans sa globalité. On n’a que des pierres, mais l’édifice est beaucoup plus grand ». La députée plaide pour que le portage politique de l’ESS soit mené directement auprès du Premier ministre pour une « véritable transversalité » ou pour un retour dans le giron de Bercy, comme le demande l’Udes. Pour Yves Blein, le PLF 2019 est loin d’être négatif : « oui, il y a eu des actions qui ont commis un certain nombre de dégâts mais la bascule du CITS en allègement de charge est un effort sans précédent pour l’ESS dans son ensemble. Selon les premiers calculs, le CITS c’était 500 millions par an. Avec l’allègement de charges nous seront sur un montant entre 1,2 et 1,4 milliards d’euros ». Selon lui, l’augmentation des crédits de 25 % gérés par le Haut commissariat à l’ESS est significative de l’orientation prise : « l’exécutif dit : on met le paquet sur French impact. [Et] le Pacte de croissance devra être le révélateur de l’ambition du gouvernement pour mener un projet fort sur l’ESS. »

Deux annonces pour le prix d’une ?

La présentation du Pacte de croissance de l’ESS au Conseil supérieur de l’ESS est donc particulièrement attendue. Mais la réunion du Conseil supérieur de l’ESS, prévue le 16 novembre a été reportée à la fin du mois. Peut-être que l’on retrouvera dans ce Pacte des mesures qui font l’objet d’une proposition de loi dont l’examen est programmé le 29 novembre. Cette proposition de loi, portée par Sarah El Hairy reprend plusieurs mesures du rapport sur la vie associative remis au ministre au printemps dernier tels que le fléchage des comptes en déserrance vers le soutien à la vie associative ou l’autorisation, pour une association de conserver ses excédents d’exploitation. Et le hasard pourrait faire qu’au même moment, le gouvernement annonce son arbitrage sur les mesures proposées par les animateurs du chantier Vie associative dans leur rapport remis à Edouard Philippe au printemps dernier…

Calendrier chargé pour l’ESS en cette fin d’année, à moins que toute ces échéance ne soient finalement reportées.  Encore une fois.

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