Rapport Schatzman : de l’expérimentation à la R&D Sociale

06/07/2020
Actualité
Connecter, renforcer les compétences, investir… les 21 propositions du rapport « Financer l’innovation sociale » souhaitent s’appuyer sur l’existant pour créer une culture de la Recherche & Développement dans les structures de l’économie sociale et solidaire.

Faire un pas de plus. L’esprit du Rapport coordonné par Jérôme Schatzman est loin de la table rase ou des grands soirs de l’innovation sociale. Son auteur salue dans notre interview un écosystème que d’autres pays nous envie. Mais le rapport dessine aussi la perspective d’un changement de modèle pour l’innovation sociale. Le rapporteur constate que si l’ESS ne passe que trop rarement le cap de la recherche et développement sociale dans son processus d’innovation : « Toute la question est de garder cette énergie que nous mettons dans les expérimentations pour la transférer sur de la production de connaissances. »

Un CITS « Recherche » ?

L’objectif ultime est donc de donner à l’innovation sociale un statut stratégique dans notre pays, au même titre que l’innovation technologique qui bénéficie d’une véritable politique. Le crédit impôt recherche, en est l’un des principaux outil qui alloue aux entreprises 7 milliards d’argent public chaque année (le crédit impôt recherche permet aux entreprises française de récupérer 30 % de leur budget R&D en crédit d’impôt).

Les organisations non-lucratives n’étant pas assujetties à l’impôt sur les sociétés, le CIR ne profite que très rarement aux entreprises de l’ESS. C’est pourquoi le rapport envisage la création d’un volet « Recherche » du crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires (CITS). Le contexte budgétaire ne laisse que très peu d’espoir à une telle proposition d’aboutir à court terme. C’est pourquoi le rapport envisage de lancer dans un premier temps un fonds de 10 millions d’euros annuels pour financer la R&D sociale. Une sorte de ballon d’essai pour démontrer à l’Etat l’intérêt stratégique de l’innovation sociale.

Structurer les modèles d’entreprise

Mais le besoin d’attirer de nouveaux flux financiers n’est pas l’essentiel à ce jour, selon le rapport Schatzman. Deux axes stratégiques sont identifiés. Le premier est d’avancer par une culture commune de la mesure d’impact sociale afin que l’écosystème existant entre les porteurs d’innovation sociale et les financeurs donne tout son potentiel. Pour ce faire, (proposition 5), un plan national de formation à l’évaluation d’impact (3,5 millions d’euros  par an) pourrait concerner l’ensemble des acteurs de l’accompagnement pour qu’ils guident à leur tour les innovateurs sociaux.

Le second axe est celui du renforcement des compétences « gestion » des entreprises de l’ESS (prop. 6) afin d’être en capacité d’intégrer la R&D dans le modèle économique. Le rapport envisage un financement de deux ans,dégressif pour l’embauche de « cadres de gestion compétents et expérimentés, adaptables et préparés aux spéficificités de l’innovation sociale. » Une financement de 10 millions d’euros par an (moitié public, moitié privé) permettrait d’envisager l’embauche de 100 cadres chaque année.

Convaincre les investisseurs

Les sources de financement évoquées dans ce rapport suivent la ligne posée par le Haut-commissaire à l’ESS, Christophe Itier. Celui-ci prône, depuis son entrée en fonction, la coalition de la puissance publique avec le secteur privé qu’il soit responsable, à impact ou de l’économie positive. Dès lors, le budget de l’État ne pourrait être le seul financeur potentiel. Au contraire, l’engagement étatique se limite à un « effet levier » sur l’engagement de financeurs privés. La dernière proposition du rapport (prop. 21) invite à la création d’un fonds « première perte » destiné à convaincre des investisseurs de tenter un premier galop dans l’investissement social en effaçant leur risque financier. Celui-ci, en cas d’échec, serait supporté par les financeurs publics du fonds.

Et maintenant…

Ce rapport, remis le 24 juin, intervient au moment où un nouveau gouvernement est nommé afin d’incarner l’Acte III du quinquennat d’Emmanuel Macron. Les nouvelles priorités politiques et la place que le soutien à l’ESS pourra y prendre conditionneront le fait de savoir si ce rapport a des chances d’être suivi ou rangé dans un tiroir.

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