Monitrice-éducatrice, Sabrina Boumaïza devrait être en télétravail suite à la fermeture de l’Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (Itep) qui l’emploie à Lyon. Elle a préféré se porter volontaire pour renforcer l’équipe de la maison d’enfants à caractère social Les Alizés où les enfants placés se retrouvent confinés 24/24 heures.
« Il faut se remettre dans les épithètes ! » soupire Sabrina Boumaïza en gardant le sourire dans la voix. La monitrice-éducatrice de 37 ans, s’est éloignée du groupe qu’elle accompagnait dans leur travail scolaire pour nous parler au téléphone. Cela fait presque deux semaines qu’elle a rejoint la Maison des enfants des Alizés Saint-Romain-au-Mont-d’Or) où vivent, confinés, 22 enfants de 4 à 18 ans. Habituellement, elle travaille à l’Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (Itep) Elise Rivet, à 20 minutes de là. Les deux organismes sont gérés par la même association, Le Prado, qui a mis en place une mobilité professionnelle temporaire pour tenter de suppléer aux besoins des établissements devant rester ouverts(voir en fin d’article).
A l’Itep, Sabrina intervient sur le champ éducatif auprès des élèves en situation de handicap, en soutien avec l’équipe pédagogique. L’institut ayant fermé depuis le 16 mars, elle s’est portée volontaire pour prêter main forte à l’équipe des Alizés, confrontée à une intensification de leur activité, du fait de la présence des enfants en journée, alors que 30 % des effectifs manquent à l’appel.
Maintenir le cadre
Ce renfort est tout sauf un luxe. La protection de l’enfance supporte mal le sous-effectif qui touche pourtant de nombreux établissements durant cette crise sanitaire. C’est un travail de dentelle, précis dans sa progression et fragile dans son édification. La priorité d’une maison d’enfants, comme les Alizés, est donc de préserver un cadre structurant et rassurant pour des enfants qui, jusque-là, ont été bousculés par la vie, confrontés au pire, que ce soit les violences, les addictions, la sous-nutrition… « Les enfants ne veulent pas s’attacher car ils savent que je ne suis pas là pour longtemps. Ce n’est pas évident pour eux, ce sont des enfants qui ont de grosses carences affectives », analyse Sabrina qui s’est donc mis au service de l’équipe pour assurer au mieux sa mission.
Mobilité de crise
La jeune femme de 37 ans connaît d’ailleurs bien l’un des enfants placés puisqu’elle s’en occupe à l’Itep Elise Rivet : Rayan (le prénom a été modifié), souffre de troubles du comportement. « On tente de faire 2 heures de travail scolaire par jour, mais c’est difficile pour lui comme pour les autres. Ils ne retrouvent pas la temporalité et le cadre habituel de l’école qui dit, on s’y met ! Et puis ici il y a ses copains. » Mais on y arrive… « J’apporte ce que je sais, puisque j’évolue d’habitude dans un environnement scolaire… »
Le passage de l’Itep à la maison des Alizés s’est organisé naturellement. Les deux établissements sont gérés par la même association, Le Prado, qui compte 35 établissements (foyers, maison d’enfants, Itep, structures d’insertion…) avec 550 salariés sur la protection de l’enfance dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Cette solution, gérée face à l’urgence, permet d’assumer au mieux la continuer du service, là où il ne peut s’arrêter et d’apporter une motivation supplémentaire aux salariés coupés de leur quotidien professionnel du fait de la fermeture de leur site.
Capitaliser sur l’inédit
Le terme du confinement reste flou. Mais Sabrina sait déjà avec quoi elle repartira ce jour-là. « J’avais des contacts avec les éducateurs au sujet de Rayan, mais maintenant on se connait et je comprends beaucoup mieux la difficulté de leur mission, relève Sabrina. Quand ce sera difficile pour lui d’y retourner, surtout après un weekend en famille, je saurai mieux dire à Rayan en quoi il a intérêt à être à la MECS, ». Ah ! Dernière chose : « à la rentrée, je pourrai aussi expliquer aux profs de l’Itep que Rayan a fait ce qu’il a pu sur le travail scolaire, j’y étais ! »
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