Confrontations Europe a récemment publié un numéro spécial consacré à la contribution de l’ESS à l’Union européenne. On y trouve un état des lieux des pratiques et des enjeux et des mises en perspectives très opportunes pour enrichir les politiques européennes et y intégrer de nouvelles dynamiques favorables…
Intitulé « Pour une économie de la confiance en Europe : la contribution de l’ESS. De la crise à la transformation sociale », le numéro spécial du think tank Confrontations Europe (qui par ailleurs publie une revue trimestrielle éponyme), est une enquête sur : est-ce que l’économie sociale et solidaire est un « mouvement de fond, porteur de nouvelles formes d’action sociale économiques et politiques ? ».
L’ESS, socle d’une nouvelle politique européenne ?
Pour répondre à cette question, le lecteur pourra s’attarder particulièrement sur l’introduction de Nicole Alix, administratrice déléguée en charge de l’ESS à Confrontations et de Matthieu de Nanteuil, professeur à l’Université catholique de Louvain, qui pose des jalons de ce numéro, « l’ESS dans l’UE, socle d’une nouvelle économie politique ». Ils rappellent le contexte européen et interrogent notamment le tour « social businness » de la Commission européenne : « Est-il un nouveau segment du capitalisme de marché, un geste responsable mais limité de la part de certains employeurs ou un mouvement plus large ? ». Et « peut-on aller jusqu’à y voir le basculement de la doctrine communautaire, reconnaissant les efforts de renouvellement de la solidarité des sociétés civiles » ?
D’autres articles susciteront bien sûr l’intérêt des lecteurs : « Le droit de l’UE et les acteurs de l’ESS », le numérique, la société du vieillissement, les nouvelles formes d’emploi et de protection sociale, les modalités de financement de l’ESS, dont un sujet qui traite des « attentes des entreprises du secteur face à une finance en crise »…
Jouer un rôle croissant et d’avenir
La dernière partie de la revue s’ouvre sur des perspectives anthropologiques et politiques. Ainsi, l’article signé d’Alain Lipietz, ancien député européen et spécialiste de l’ESS traite de « la crise anthropologique et l’économie sociale et solidaire ».
Ces quelques lignes, issues d’un livre « Green deal, la crise du libéral productivisme et la réponse écologiste » paru aux éditions La Découverte en 2012, relatent le « processus d’individuation du monde occidental et de la perte de socialisation qu’était l’entreprise (devenue « invivable » du fait même des excès du libéralisme), qui pousse de nombreux citoyens à reconstituer cet associationnisme »… Dans ce contexte, déjà ancien, « l’ESS est appelée à jouer un rôle permanent et non pas d’insertion, dans une économie marchande, un rôle croissant et non pas résiduel dans le modèle de développement futur ».
Un cahier des charges exigeant pour l’UE
Autre mise en perspective, « en guise d’envoi », cette fois plus précise et concrète, le travail consacré au cadre européen favorable à des solutions d’économie sociale et solidaire qui ferme ce numéro spécial. Après avoir fait le constat d’un « courant positif au sein de la Commission », l’auteur établit un véritable cahier des charges à destination des autorités de l’UE : encourager l’adoption de législation de soutien de ESS dans les pays de l’Union, développer du financement des investissements sociaux de long terme, accompagner des porteurs de projet à travers des clusters de coopération économique, « reconnaître le droit d’initiative et de portage de projets collectifs de l’ES ne relevant pas de commande publique », promouvoir des systèmes de protection sociale volontaires ou collectifs »…
L’ESS, une forme de l’économie
Au-delà, indique l’article de Nicole Alix : « L’ESS peut non seulement apporter des solutions d’urgence et de réparation des exclusions sociales, mais… elle peut contribuer à réconcilier les citoyens avec l’Europe, qui commence à être vue plus comme une menace qu’une promesse »… Car « l’ESS invente aussi en permanence de nouvelles formes de protection sociale volontaires, sous formes de coopératives, de mutuelles de santé… Il existe des échelles complémentaires de développement économique dont ni l’Etat ni le marché ne peuvent faire l’économie ». C’est pourquoi, « l’ESS doit être promue non pas comme un « tiers secteur », fonctionnant comme une logique de niche, mais comme une forme de l’économie de marché dans laquelle la répartition de la valeur ajoutée se fait avant la fabrication du résultat, et non seulement par redistribution fiscale et mécénat ».
Pour se procurer la revue l’Option « Pour une économie de la confiance en Europe : la contribution de l’économie sociale et solidaire. De la crise à la transformation sociale », se rendre sur le site de Confrontations Europe : www.confrontations.org