[SELECTION LIVRE 2/3] La présidente du Mouvement associatif, qui est aussi docteure en sociologie, analyse dans un essai les modes de mobilisation des jeunes pour mieux interroger notre projet démocratique et l'Economie sociale et solidaire de demain.
"Collectiviser" les causes
Comment les jeunes se mobilisent face aux crises (éd. Les Petits matins, nov. 2023) est autant un appel à considérer la jeunesse d'aujourd'hui qui sera aux manettes demain, qu’un plaidoyer pour le renforcement de notre démocratie (et l'ESS y a un rôle selon Claire Thoury).
L'ouvrage apporte en premier lieu une photographie éclairante sur les façons d'être et de faire chez les jeunes qui s'engagent. Des jeunes qui, potentiellement, les animateurs et dirigeants du monde associatif de demain. Leur engagement est plus global que précédemment (l'écologie est le plus souvent au centre, mais reliée à un ou plusieurs enjeux de justice sociale ou d'égalité). Plus radical aussi au sens où il est marqué par l'urgence du résultat attendu. Et cet engagement préfère se concentrer sur l'action concrète, plutôt que dans l’implication dans un mouvement, une "famille" où l'on pourrait grandir et évoluer.
Cette « individualisation » de l’engagement n’est pas un détail car cette affirmation résonne avec la difficulté des mouvements associatifs et fédération de renouveler leur gouvernance.
Puissance et pouvoir
Autre élément saillant : les jeunes interrogés par Claire Thoury semblent se détourner de l'engagement politique, considérant que s'engager pour des causes est déjà politique et donc suffisant. L'occasion, pour celle qui est aussi membre du Conseil économique social et environnemental, de rappeler que la puissance d'un mouvement collectif ou d’un corps intermédiaire, n'est pas identique au pouvoir de décider dont dispose le politique.
Plaidoyer pour une démocratie complète
A partir de ces constats, Claire Thoury envisage la manière dont notre démocratie pourrait évoluer pour se renforcer. Elle défend la démocratie représentative qui est le socle de la décision partagée, tout en insistant sur une reconfiguration de cette dernière avec les sphères complémentaires de la prise de décision. L’autrice en voit deux. Les corps intermédiaires qu’elle souhaite voir « réenchantés » et les espaces de concertation citoyenne, avec, par exemple les Convention citoyenne qui ont a trouver leur place dans la chaine.
Cette reconfiguration tourne autour de plusieurs piliers : tenir compte « plus sérieusement des attentes de cette génération d’engagés pour ne pas passer à côté de quelque chose de structurant », accepter le partage du pouvoir avec cette génération, mieux articuler les causes sociales et écologiques pour fabriquer un récit qui engage justement. Un travail que Claire Thoury identifie déjà dans ce qui est réalisé par le Pacte du pouvoir de vivre qui associe depuis 2019 la société civile organisée (réseaux syndicaux, associatifs, sociaux et environnementaux... Autrement dit des corps intermédiaires) ou encore par ESS France qui construit, des propositions politiques pour défendre une ambition sociétale partagée.
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